Loin des châteaux
Loin des fêtes
Loin de tout.
Il n'est pas là.
Rien ne change
Tout est pareil.
La vie,
La mort,
Au fond de ta prison
Tu rumines tes anciennes amours
Et pourtant,
De tous tes souvenirs,
Il ne reste plus presqu'un nom.
Qu'une image maintenant floue,
Une vision incertaine,
Quelques rires lointains
Quelques gestes furtifs,
Volés aux bonheurs du passé.
Un jour
Tu le retrouveras,
Vous vous l'êtes promis.
Alors pourquoi tant de peines ?
Là-haut,
Les anges l'accompagnent
Avec la bénédiction des dieux.
Même si tes sentiments se refroidissent
Tu le sais pourtant
Que rien ne dure.
Tout se transforme
Et se crée différemment.
L'amour n'est guère éternel,
Il est comme le soleil,
La pluie,
Les nuages.
Tout disparaît petit à petit.
Bien sûr,
Tu penses aux promesses,
Mais toi,
Qu'est ce qui t'assure
La continuité de votre avenir ?
Ta prison,
Tu te l'es construite
Doucement,
Et,
Petit à petit,
Tu t'es emmuré.
Ton silence,
Exaspérant mutisme
Fut plus fort que ta joie.
Sans t'en rendre compte
Tu t'es transformé.
Mais dieux
Qu'est-ce qui t'as pris ?
Fourvoyé par une mysticité
Tu as cru si fort
Aux dieux
Et à tous ces anges,
Que
Le mal te rongeait tranquillement,
Et tu ne t'apercevais pas
Que tout autour de toi
Tout fanait
Et partait
En mille morceaux.
Maintenant,
Seul dans ta chambre
Tu rumines
Et t'enfermes dans ton abnégation.
Ta résignation à ne plus parler,
A ne plus écouter,
A ne plus te nourrir,
Crois-tu que cela soit la bonne solution ?
Crois-tu que c'est en te faisant violence
Que tu réapprendras le goût à vivre ?
Que crois-tu qu'ils font faire les autres ?
Qu'ils vont t'aider ?
Pauvre fou !
Au contraire,
Ils ne sont là
Que pour te détruire un peu plus !
Un peu plus de médicaments,
De potions,
De délires,
D'enfermements.
Un jour,
Tu partiras.
Un jour,
Ils ouvriront la porte.
Ils te trouveront là,
Gisant,
Avec un sourire béat sur ta face.
Un jour,
Tu partiras.
Ils nettoieront alors ton sang,
Te changeront de vêtements.
Des vieux habits d'hôpitaux,
Tout mités,
Pas beaux,
Et,
Sur le brancard,
Enveloppé dans un drap blanc,
Ils te mettront dans le frigo.
Température : -4°.
Ton corps sera froid,
Inerte,
Avec sur tes yeux
Et aussi sur ta bouche,
De tout petits sparadraps pour les tenir fermés,
Peut-être même,
Qu'ils te couseront la bouche
Pour qu'elle se ferme à tout jamais.
Tu ressembleras
A ces poulets d'hypermarchés !
Ils te colleront un numéro,
Et tu partiras
Dans une petite maison en sapin.
Que crois-tu ?
Tu as mal ?
Tu souffres ?
Il est parti,
Il ne reviendra plus.
Son amour est fini,
Il faut réagir,
Sinon… Sinon…
Et puis,
Il est parti…
( A Laurent 1971-1991)