Christ s'arrêta de courir un instant,
Il s'épongea le front.
Le temps était au froid,
Il transpirait pourtant.
La fuite ?
La peur ?
Peut-être un peu des deux !
La femme qui le traquait
Ne lui laissait aucun répit.
Il était la cible,
La proie à trouver.
Des affiches,
Des portraits-robots
Traînaient sur les poteaux,
Les réverbères,
Les magasins,
Les bars de la ville !
Il avait pu fuir, in extremis,
Du dernier traquenard tendu.
Il retournait, dans sa tête,
Toutes les hypothèses
De ce qu'il aurait pu faire,
Contrarier, gêner
Dans cette ville.
Ce village devenu ville
Qui l'avait vu naître,
Grandir et s'affirmer
En tant qu'homme.
Maintenant,
Dans ce présent lamentable,
Ce futur contrôlé, étriqué, policé,
Il ne comprenait pas
Cette chasse à l'homme.
La nuit était son seul refuge,
Son seul espoir.
Quand les soleils se couchaient
Pour laisser place
Aux trois lunes rousses,
Christ pouvait se reposer.
Quand,
Du bout à l'autre de la ville,
Le bruit, les lumières s'éteignaient,
Quand,
Tout le monde dormait,
Alors Christ se sentait en sécurité.
Le dôme qui recouvrait
Entièrement la ville
La protégeait de l'air toxique extérieur
Et des rayons mortels de ces lunes.
Curieusement,
On pouvait voir à travers les parois
De cette protection,
Mais la lumière extérieure émise
Ne pouvait traverser cette matière.
La ville, ainsi,
Etait plongée dans le noir
Et toute activité cessait alors.
Toutes vies,
Animales, végétales
Arrêtaient ses activités.
C'était un endormissement total.
L'un après l'autre
Les soleils se levaient.
Frappé par un rayon,
Christ ouvrit un œil,
Puis deux,
Et se leva.
Il scruta l'horizon,
Et vit sa peur grandir
Elle était là, encore,
Qui s'agrandissait au fur et à mesure.
Il la voyait prendre forme,
S'étalait sur les murs avoisinants,
Comme pour se moquer de lui,
Comme pour lui dire : " Tu ne m'échapperas pas !"
Il comprit à cet instant,
Que cela ne servait à rien de fuir.
Alors il ferma les yeux
S'arrêta de respirer
Et se laissa envahir
Par son ombre.
Il avait à peine
30 ans !